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Les Echos du Sud-Ouest

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Tribunal de Grande instance de Gaoua : 25 cas d’accidents mortels de Janvier 2020 à nos jours selon le procureur Alfa Cheick Aboubakar Compaoré


Les accidents de la circulation sont lésions dans la région du sud-ouest, faisant malheureusement des victimes. Le dernier en date est celui de Banlo où un véhicule des agents du CCVA a fauché mortellement un enfant de 10 ans. Il s’en est suivi un lynchage des trois occupants du véhicule. Face à la recrudescence des cas d’accidents mortels une équipe de Bafujiinfos.com est allé à la rencontre du procureur du tribunal de grande instance de Gaoua pour savoir la suite donnée à ces accidents sur le plan judiciaire.

Le procureur Cheick Alpa Aboubakar Compaoré et les deux substituts du TGI de Gaoua

Bafujiinfos.com : Pouvez-vous donner des statistiques  sur les cas d’accident de la circulation traités par la justice de Gaoua?

Cheick Alfa Aboubakar Compaoré : Du mois de janvier de l’année 2020 à nos jours, nous avons recensé 58 cas d’accident de la circulation routière dans la province du Poni et du Noumbiel dont 25 cas mortels. Ces statistiques sont fournies par le répertoire du parquet de Gaoua. Les accidents causés par les motocyclistes sont les plus nombreux.

Bafujiinfos.com : Quelle est la suite donnée aux dossiers transférés par la police ?

Cheick Alfa Aboubakar Compaoré :  Les dossiers d’accident de la circulation routière peuvent recevoir trois types de traitement :

– Le classement sans suite lorsque les faits ne peuvent recevoir aucune qualification pénale (par exemple une chute libre ayant entraîné le décès, les blessures ou la dégradation de bien) ou lorsque les poursuites peuvent paraître inopportunes (par exemple, les parties ont transigé et n’entendent pas s’intéresser à une quelconque procédure judiciaire).

– le flagrant délit : l’auteur de l’accident à qui on peut reprocher diverses infractions en matière de circulation routière, notamment le défaut de maîtrise, l’excès de vitesse, le défaut de signalisation en situation de stationnement, le défaut d’éclairage, le défaut de visite technique, le défaut d’assurance, le défaut de permis de conduire, la dégradation involontaire de biens mobiliers ou immobiliers, les blessures involontaires, l’homicide involontaire, etc., peut être directement traduit devant le tribunal correctionnel pour répondre de ces faits. En général, suivant cette procédure, l’auteur de l’accident est placé sous mandat de dépôt en attendant son jugement.

– la citation directe : l’auteur de l’accident peut également être poursuivi pour les infractions citées plus haut suivant la procédure de citation directe. Dans ce cas, il comparait libre devant le tribunal pour se faire juger

Il faut préciser qu’en ce qui concerne les deux dernières procédures, l’auteur de l’accident peut être condamné à une peine d’emprisonnement ferme ou avec sursis et ou à une peine d’amende ferme ou avec sursis ou être purement et simplement relaxé.

Il faut également préciser que le choix entre la procédure de flagrant délit et celle de citation directe se fait en tenant compte des circonstances de faits de l’accident et du trouble à l’ordre public qu’il est susceptible de créer.

Relativement aux dédommagements des victimes et ayants droit des victimes, il faut distinguer deux situations :

  1. Le propriétaire du véhicule a souscrit à l’assurance obligatoire. Dans ce cas, l’indemnisation se fera sur la base des dispositions du code CIMA (Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurances). Un délai de transaction d’une année entre la société d’assurance et les victimes est prévu par ledit code. C’est à ce niveau généralement que la procédure piétine. Les victimes éprouvent souvent des difficultés pour accomplir les formalités requises par l’assurance (par exemple la production des actes de naissance des enfants du défunt ou même la production de l’acte de décès, etc.).
  2. Le propriétaire du véhicule n’a pas souscrit à l’assurance obligatoire. Il sera poursuivi pour défaut d’assurance et l’indemnisation des victimes sera à sa charge. Dans ce cas, comme l’assurance n’intervient pas, la procédure ne prend pas du temps.

Bafujiinfos.com : Est ce qu’il arrive que des plaignants abandonnent ?

Cheick Alfa Aboubakar Compaoré : Il arrive que des victimes abandonnent ou même ne s’intéressent pas à la procédure soit du fait des traditions ( elles estiment souvent que la vie humaine n’a pas de prix, qu’elles ne sauraient recevoir une indemnisation résultant de la mort accidentelle de leur proche et que celle-ci résulte de la volonté de Dieu), soit du fait d’un découragement résultant des démarches liées à l’assurance. En tout état de cause, l’abandon par les victimes de la procédure ne met pas fin aux poursuites. L’auteur de l’accident sera jugé pour les infractions relevées au cours de l’accident. Mais la juridiction ne se prononce pas sur les aspects liés à l’indemnisation. Dans tous les cas, les victimes peuvent à tout moment saisir le tribunal civil pour se voir être indemnisée.

Bafujiinfos.com : Certains parents accusent la justice de ne pas donner une suite favorable ou que les dossiers sont classés ?

Cheick Alfa Aboubakar Compaoré :  Cette question trouve sa réponse dans la réponse à la question 2. Lorsqu’un dossier est classé sans suite, nous prenons le soin de notifier un avis de classement sans suite à la partie concernée. Dans ce cas, elle peut, sur la base de cet avis de classement sans suite, saisir le juge d’instruction par une plainte avec constitution de partie civile. Elle peut aussi, par voie d’huissier, saisir directement le tribunal correctionnel. Quant à l’issue du jugement, il faut dire que les juges décident en toute indépendance conformément à la loi. L’auteur d’un accident peut n’avoir commis aucune faute nécessitant sa condamnation.

Bafujiinfos.com : Quels conseils donnez-vous aux usagers dans pareille situation?

Cheick Alfa Aboubakar Compaoré :  Nous invitons les usagers de la route à respecter scrupuleusement le code de la route et à régler leur vitesse de sorte à éviter les écueils prévisibles de la circulation. Aux riverains, nous leur demandons d’éviter l’occupation anarchique des abords des routes, d’être très vigilants à l’égard des enfants, d’éviter de traverser les routes en courant, de s’abstenir de tout acte de vengeance en cas d’accident. Aux victimes, nous les invitons à s’informer davantage sur les procédures. Elles peuvent toujours se renseigner au niveau du parquet ou au niveau de l’unité de police judiciaire chargée de l’enquête.

Dalou Mathieu Da



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