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Les Echos du Sud-Ouest

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Crise sanitaire et relance des entreprises :il faut agir dès que le mal se fait sentir selon Lucain Somé enseignant chercheur en sciences de gestion


Dans cette tribune Lucain SOME, enseignant chercheur en sciences de gestion, expert  et Conseiller en fiscalité et en Management  des Entreprises et des Organisations analyse la crise économique et sociale liée au COVID19. Le spécialiste propose des pistes de solutions pour les autorités mais aussi pour les entreprises qui doivent se réadapter. Lisez plutôt!

Le CORONAVIRUS a bouleversé les activités économiques des entreprises mais aussi a impacté le vivre ensemble d’où son caractère de crise sociale et économique. Ce choc déstabilise même les économies les plus structurées avec leurs grandes entreprises ou multinationales. Si ce choc touche toutes les entreprises, il n’est cependant pas ressenti de la même manière par toutes. Autant des actions sont menées à travers des dons pour lutter contre la pandémie, autant des réflexions doivent concomitamment être engagées sur la capacité (ou l’offre à faire aux entreprises pour la résilience) de résilience de ces entreprises. Les entreprises se doivent d’aller à l’information, de s’approcher des spécialistes qui analyseront la situation à l’aide entre autres des outils de l’intelligence économique (ou de veille stratégique). C’est une très belle démarche à notre sens car elle consiste à collecter et interpréter l’information économique immédiate ou ultérieure, individuelle ou collective et de diffuser ces informations après traitement afin d’aider les entreprises.

Les réflexions iront également dans le sens d’identifier les déterminants capables d’influencer de façon négative et significative sur les capacités de résiliences des entreprises afin d’apporter des solutions. Sans être limitatif, nous présentons dans cette tribune quatre (4) facteurs que nous estimons fondamentaux qui pourraient contribuer à limiter la relance des entreprises avec nos propositions de solutions pour y rémédier.

  1. L’influencent décisive des contraintes financières et de la demande

Il n’est secret pour personne que sous nos cieux l’accès aux financements est l’un des facteurs qui influencent négativement sur la croissance des entreprises et particulièrement des PME. Même en situation normale, cela est vécu avec beaucoup d’acuité et le sera avec plus d’atrocité après la crise. Les structures de financement mises en place par les pouvoirs publics, en dehors probablement de leurs résultats tangibles sur le plan politique, leur appui aux entreprises en général et aux PME en particulier est dans le meilleur des cas mitigé.

L’aggravation du risque de défaut de paiement (après une crise) exige certes une prudence de la part des institutions financières, mais parfois ces dernières n’intègrent pas forcement dans les éléments d’analyse financière traditionnellement utilisés, la dimension exceptionnelle de la crise. Ce qui rend très peu d’entreprises éligibles aux financements. Il est alors indispensable que les entreprises  approchent leurs banquiers (pour des négociations de lignes de crédits) ou d’autres spécialistes pour un montage de dossier financier solide et bancable.

Le deuxième élément, c’est la baisse de la demande de consommation, une crise de cette ampleur est nécessairement suivie d’une baisse de la demande. Cette baisse s’expliquerait entre autre par la baisse du revenu des ménages, les effets résiduels persistants de la crise et par l’épargne de précaution.

Le consommateur se contentera de l’essentiel tant que son revenu restera faible ou incertain. Cette situation joue négativement sur la capacité de remboursement des entreprises.

En effet, il est démontré que la crise financière de 2008 a entrainé un ralentissement voire une baisse de la consommation des ménages ;  le Burkina n’échappera à cette situation au regard de la double crise qu’il vit. La baisse de la demande épuise rapidement les réserves en matière de fonds de roulement des PME. Le nombre d’entreprise insolvable augmente si des financements à court terme ne peuvent être obtenus (OCDE, 2009).

La relance de la consommation est de la responsabilité de l’Etat à travers les politiques macro-économiques et budgétaire à sa disposition.

  1. Le rôle déterminant d’un environnement sécurisé

Il s’agit ici de l’ensemble des conditions favorables ou défavorables à la reprise des activités après le COVID-19. En effet, c’est du truisme de dire que l’investissement a besoin d’un environnement serein sur le plan sécuritaire. Un critère qui est loin pour le moment d’être rempli par le Burkina Faso au regard du djihadisme, Aussi, beaucoup de petits commerces ne résisteront pas à l’après crise sanitaire. Il n’existera plus de fonds pour la reprise des activités après cet arrêt des activités dû à la crise sanitaire. Il faut alors craindre une augmentation du chômage après le COVID-19 et subséquemment une montée du banditisme. Il faut dès lors assouplir les conditions d’accès aux financements dans les différents fonds nationaux afin de permettre aux acteurs du secteur informel, aux TPE et aux PME de bénéficier d’appui financier pour la relance de leurs activités. La reprise des activités contribuera à créer un climat serein et sécurisé. Même si après le COVID 19, le Burkina demeure dans un environnement incertain lié au terrorisme, les pouvoirs publics devront travailler à une prise de mesures holistiques pour un retour rapide de la sécurité dans le pays.

  1. L’influence de la communication interne

La communication interne est l’une des composantes essentielles dans la gestion de la crise et la relance des entreprises. La communication interne est perçue comme une source d’information fiable. L’entreprise doit communiquer de manière claire et régulière sur sa vision stratégique, savoir où elle va et les efforts à consentir doivent être partagés par tous. En effet, lorsque la crise survient, le chef d’entreprise se trouve dans une posture où les décisions à prendre se multiplient. Il doit réagir le plus rapidement possible, le maître mot en matière de gestion de la crise est l’anticipation. Ces mesures d’anticipation doivent être partagées avec l’ensemble du personnel, d’où la nécessité d’instaurer une communication interne vraie. A travers cette communication, les travailleurs sont associés à la prise de décision. Dans ces conditions, les organisations syndicales ne sont pas figées, elles sont capables d’une formidable énergie et de sacrifice si on leur propose un plan cohérent et sincère de relance.

A l’heure où les informations les plus sensationnelles sont véhiculées souvent sur la base de la seule imagination de leurs auteurs sans fondement réel, il est du devoir impérieux pour l’entreprise d’éviter le vide informationnel en communiquant avec les travailleurs.

  1. La faible capacité des PME en ressources humaines qualifiées

Selon l’OCDE (2009), les PME emploient plus de la moitié des travailleurs du secteur privé. Dans l’Union Européenne, elles représentent 99% des entreprises, avec un faible taux d’employabilité (91% des entreprises emploient moins de 10 employés).  .

Au Burkina Faso, les PME Burkinabè ont un taux d’employabilité très faible (Maison de l’Entreprise, 2011). Le personnel est parfois très peu qualifié et de ce fait commis à des tâches d’exécution. Dans ce cas, le Chef d’entreprise se retrouve seul chef d’orchestre. Il doit planifier – exécuter – évaluer – réorienter. Ce rôle doit être davantage réaffirmé après la crise contrairement aux grandes entreprises qui disposent de cadres compétents.

Pour faire face à toutes ces difficultés, les PME ont besoin d’être  informées – formées et conseillées. Ce rôle ne relève pas seulement de la responsabilité de l’Etat, mais de tous les acteurs intervenants dans le domaine d’accompagnement des entreprises. Il est vrai que l’information, la formation et le conseil ont un coût, il faut alors redynamiser les fonds nationaux pour qu’ils prennent en charge ces coûts afin de permettre aux entreprises de jouer leur rôle de création d’emplois et de richesse (FAIJ, FASI, FAPE, FAFPA, FAARF, etc).

Dans cette situation, il est indéniable que l’innovation est le seul moyen de survie. En effet, une culture d’innovation forte peut être un moteur de croissance extraordinaire pour votre entreprise.

Les PME ne doivent pas oublier qu’elles évoluent dans un environnement concurrentiel sans pitié dans lequel il faut des ressources humaines qualifiées pour une riposte adaptées.

 Ainsi, seules les PME capables de conduire des innovations tireront meilleures parties de cette crise ; comme nous l’avons déjà signalé, en temps de crise, l’argent change de main, il ne disparait pas.

Aussi, si l’on n’y prend garde, le coronavirus va tuer plus de PME que d’êtres d’humains et donc ses conséquences perdureront plusieurs années après la disparition du virus.

Nous terminons par ces propos de Éric Le Boucher, « la crise que nous vivons est plus économique que sanitaire. Elle va obliger les entreprises à revoir leurs chaînes de production. Mais elle risque surtout de faire baisser l’investissement et, au passage, de pousser vers la faillite de très nombreuses PME ».

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SOME Lucain

Docteur en Sciences de gestion

Expert – Conseil en fiscalité et en Management

    des Entreprises et des Organisations

somelucain2@gmail.com

Tel : 78 86 18 33



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