À Gaoua, dans la région du Sud-Ouest du Burkina Faso, les acteurs de la protection de l’enfance multiplient les efforts pour garantir les droits des enfants, malgré un contexte sécuritaire et socio-économique difficile. Les initiatives se multiplient, mais des défis majeurs, comme l’orpaillage et les mariages précoces, continuent d’entraver la pleine réalisation des droits de l’enfant.
À Gaoua, chef-lieu de la région du Sud-Ouest, les défenseurs des droits de l’enfant s’activent au quotidien pour faire respecter les textes législatifs en faveur de l’enfance. Leur engagement est d’autant plus remarquable que la région traverse depuis une décennie une crise sécuritaire ayant entraîné le déplacement de milliers de personnes, dont de nombreux enfants.
Cette instabilité a fortement perturbé le système éducatif. Selon un rapport du Secrétariat technique de l’Éducation en situation d’urgence, 53 structures éducatives (préscolaires, primaires et post‑primaires) étaient fermées dans la région du Djôrô en janvier 2022, affectant plus de 5 300 élèves et 182 enseignants. Face à cette situation, les autorités locales se mobilisent pour favoriser la réintégration des enfants déplacés dans les établissements scolaires des zones d’accueil.
Plusieurs structures locales et organisations non gouvernementales interviennent pour assurer l’épanouissement des enfants. Le Parlement des enfants du Poni, antenne provinciale du Parlement national des enfants du Burkina Faso, joue un rôle actif à Gaoua. Créé en 1997, il offre un espace d’expression aux enfants, leur permettant de sensibiliser les communautés et de défendre leurs droits, notamment en matière d’éducation, de lutte contre les violences et de prévention des pratiques néfastes.
Plan International, à travers son Bureau de Ha ouais , est également un acteur clé. « Nous avons renforcé les capacités des cellules communautaires, ce qui a permis de prendre en charge plusieurs enfants victimes de traite. Certains ont été réinsérés dans leur famille, d’autres ont suivi une formation professionnelle et intégré la vie active », affirme Méda D. G. Clément, directeur régional de l’ONG. Dans le domaine éducatif, plus de 500 enfants déscolarisés ou jamais scolarisés ont pu être réinscrits grâce à leurs actions.
La Direction régionale du Travail, quant à elle, organise des ateliers pour renforcer la lutte contre le travail des enfants, notamment dans les secteurs agricoles et les sites d’orpaillage, en intégrant ces actions dans les stratégies régionales de développement.
Des obstacles persistants à surmonter
Malgré ces efforts, les défis restent de taille. L’orpaillage constitue l’un des principaux fléaux. Autour de Gaoua, de nombreux enfants abandonnent l’école pour travailler dans les sites aurifères, exposés à des tâches pénibles et dangereuses (concassage, vannage, transport de minerai), souvent sans protection, pendant de longues heures. Selon l’UNICEF, environ 700 000 enfants travaillent dans les mines au Burkina Faso.
Les mariages précoces et la déscolarisation des filles demeurent également préoccupants. Toutefois, des signaux encourageants émergent. À l’image de Rihanata Guiro, une jeune fille anciennement déscolarisée pour travailler dans une mine, qui a pu réintégrer le système éducatif grâce à une campagne de sensibilisation menée par l’Association des éducatrices de Gaoua. « Je suis contente aujourd’hui parce que j’ai obtenu mon Certificat d’études primaires. Je vais continuer à bien travailler au lycée », témoigne-t-elle.
Vers une protection durable et inclusive
La lutte pour les droits de l’enfant à Gaoua repose sur une mobilisation collective : autorités administratives, organisations de la société civile, médias, familles et enfants eux-mêmes. Campagnes de sensibilisation, projets éducatifs, formations professionnelles et application des lois témoignent d’une dynamique positive.
Pour pérenniser les acquis, il est cependant indispensable d’assurer un financement durable, de renforcer les mécanismes de suivi, et d’améliorer l’accessibilité aux services de protection, en particulier dans les zones rurales où les besoins sont les plus criants.
Antoine BICABA